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Un Psy dans la ville
Unpsydanslaville

Société

Malaises contemporains, phénomènes sociaux, actualités sociales, qui interpellent le psychanalyste.

Unpsydanslaville s’engage contre la cyberviolence

Nous sommes intervenues le 7 avril dernier dans un collège sur le thème de la violence sur les réseaux sociaux. Nous avions été invitées par l’organisation « Respect Zone » dont l’objet est la lutte contre la cyberviolence.

Les organisateurs avaient choisi de faire intervenir un professeur de philosophie et des psychanalystes.

Nous pouvons faire deux constats :

  • La psychanalyse est une référence théorique pour la compréhension des mouvements propres à l’adolescence et à la haine.
  • La haine est « re-devenue » un sujet d’actualité et nous ne serons jamais trop nombreux à tenter de lui faire barrage.

L’enjeu a été de transmettre à des adolescents de classe de 3° un message explicite sur leurs difficultés : nous avons forgé ce message à partir notre connaissance théorico-clinique de la psychanalyse. A leurs applaudissements, nous avons entendu qu’il était passé.

Penser

Un événement dramatique a souvent pour conséquence un empêchement de penser. Dans la légende antique, la figure mythologique de la Gorgone a le pouvoir de changer en pierre ceux qui s’aventurent à la dévisager. Ce mythe est une métaphore de l’effroi qui pétrifie, et nombre d’expressions populaires désigneront la fixité du corps et de l’esprit qui survient à la suite d’une immense peur.

Penser
Dreaming – Peinture – Agnès Desplaces

Lorsque la peur s’empare d’un groupe humain, d’une société, comme ce fut le cas après les attentats de novembre 2015, une certaine immobilité atteint le collectif, ralentissant les échanges, uniformisant les modes de réaction et de pensée. Le refuge dans une communauté d’affects et d’opinions créerait un sentiment de réparation de l’effraction causée par le drame et agirait comme une consolation. Devant l’effroi, l’impensable s’impose.

Or, il est indispensable de faire l’effort de sortir de ces réflexes consolateurs, et penser les évènements y compris les plus traumatiques pour se remettre en marche. Penser l’impensable est le signe de la force de la pulsion de vie.

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Léa, Inès et d’autres

Elles s’appellent Hanane, Léa, ou bien Inès, adolescentes fragiles, rêveuses, séduites par l’appel de leurs « sœurs » et embarquées un jour vers le djihad, la Syrie, pour rejoindre un monde meilleur. Celles-ci sont revenues, parfois au prix d’une coïncidence, plus rarement parce qu’un sursaut de vitalité leur a permis de s’extirper de l’enfer.

Escaliers – Devillard

Quel désespoir, quelle manque intime et profond, leur ont fait ainsi saisir ces mains virtuellement tendues par les commanditaires de daesh ? Dans quelle faille s’est donc engouffré le mirage aberrant du terrorisme islamiste pour faire ainsi basculer des jeunes gens ordinaires ?

Car ces jeunes filles sont d’abord des adolescentes comme les autres, qui aiment rire, danser, maquiller leurs lèvres de rouge, s’habiller en rose. Ensuite vient le noir et le silence.

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La dépression ou l’écume des vagues

Quand l’idée nous est venue de faire un texte sur la dépression, cela nous avait semblé une bonne idée… las …le stylo m’est tombé des doigts… une envie irrépressible de dormir… ou de faire autre chose ..
Pourtant ni moi ni mes collègues, ne sommes ignorantes de ce que l’on appelle la dépression.. Bien sûr que certains de nos patients présentent des symptômes dépressifs…on peut y retrouver la liste du DSM IV ou V..bien sûr que certains arrivent en ayant en mains une ordonnance de leur généraliste prescrivant des antidépresseurs ..
Alors pourquoi le stylo me tombe des mains…eh bien parce que la dépression comme entité nosographique, ne me dit rien..non que je n’ai rien à faire de ce que mes patients ressentent, bien au contraire..mais si je m’en tiens à cela, je ne leur serais d’aucune utilité…
Résumons : vous n’avez plus envie de rien, vous êtes épuisé, la moindre remarque vous irrite, l’angoisse vous étreint, vous ne dormez plus ou vous dormez trop : bien : vous êtes déprimé.
Vous trouverez toujours de bonnes âmes pour vous convaincre que la vie est belle, que vous avez dans les mains votre destin. Certains plus agressifs vous diront que vous n’avez aucune raison d’être ainsi, vous culpabilisant un peu plus.
Et puis, il y aura vous.. qui sortez de chez votre médecin, il a été attentif à ce que vous lui disiez.. il a hoché la tête plusieurs fois avec compassion, demandant des précisions sur votre appétit, votre sommeil…verdict : « vous faites une dépression, il y a sur le marché de très bons antidépresseurs, vous verrez dans 2 ou 3 semaines, ça ira mieux »
Vous regardez votre main qui tient l’ordonnance, un peu sonné. Vous allez même à la pharmacie et achetez les médicaments…mais vous n’y croyez pas trop…à son « ça ira mieux »
Non, rien ne va en définitive, vous savez, vous sentez que vous êtes à un moment crucial…soit vous prenez ces médicaments, soit vous prenez votre courage à deux mains et vous allez voir ce qui se passe..parce qu’au fond, ce que vous ne lui avez pas dit au médecin..c’est que ce n’est pas la première fois…vous avez déjà traversé ces moments de découragements intenses…bien sûr vous les avez surmontés et la vie a repris son cours..mais quand même, ça revient..plus ou moins fort…vous dépensez une énergie folle pour éloigner ces pensées sans vie…
Là, vous n’en pouvez plus, vous sentez que cette fois, vous ne pourrez pas en faire l’économie…Vous savez, oh très vaguement ou plus exactement vous avez l’intuition que ces signes manifestes de la dépression, ne disent rien de ce qui vous arrive…ils ne sont que l’écume de ces vagues de fond qui vous emmènent au large…
Le traitement de la dépression par une cure analytique, c’est cela…. voire au-delà de l’écume… mettre des mots sur votre intuition… vous entendre les prononcer… et finalement déceler du sens là où il n’y avait que creux ou vide.
Alors les médicaments, pourquoi pas…s’ils n’ont pas pour effet de gommer l’écume et de laisser les vagues de fond..sans écume mais toujours aussi puissantes…
C’est à vous de voir….

Béatrice Dulck